mardi 10 avril 2012

2.15 LE PINGOUIN (Whitehorse)





WHITEHORSE, où l'on n'a jamais vu des chevaux blancs courir, il paraît que c'est l'effet de l'eau qui court qui fait fait ça. On a encore aujourd'hui les premières hallucinations des hommes quand ils sont venus dans ce pays: des chevaux blancs qui courent. Whitehorse. Il faut dire qu'il y a des petits rapides là-bas, on sent que les icebergs se dégonflent à haute transe au printemps. Les chevaux blancs ruissellent de toute leur force (de cheval!). Le bus de l'armée s'arrête dans un parking vide pour déposer le pingouin. L'Acadienne et son Albertain repartiront vers Dawson City après avoir fait chier les chiens (un chien chie beaucoup, surtout dans un bus).
Le pingouin prit son BIG BAG et se mit à marcher vers ce qui semblait être le centre.

Personne dans les rues. Les bâtiments sont plats, il manque de hauteur. Les façades sont rongées. Les rues sont ridées. Il y a un petit groupe de gens qui blablatent, et qui blablatent tout doucement. Un groupe d'Indiens, avec des gueules d'Indiens, et des casquettes d'Indiens sur le crâne, des pantalons crades et des t-shirts crades. Quand ils ont souri en voyant le pingouin passer, il n'y avait pas dents, ou presque. Juste assez pour boire des cannes de bière et roter la bouche en cœur. SI TU CHERCHES A DORMIR, T'AS QU'A ALLER TOUT DROIT, Y A UN HOTEL PAS CHER, UN PEU DEGUEULASSE MAIS PAS CHER. VAS VOIR, PINGOUIN! La venue d'un pingouin en BIG BAG n'avait pas l'air de les étonner.
La Yukon River passe juste à côté. Il est majestueux. Il coule tranquillou sans se soucier qu'à côté de lui, des building bizarres poussaient. Le pingouin s'arrête un instant et pense...

23h, et le soleil paraît s'être arrêté à 15h. Il flotte une douce sensation de temps arrêté à Whitehorse. L'eau est claire, elle galope proprement, on voit tout tout tout, les quelques poissons et un castor fait des courbes en nageant. Le pingouin prend des cailloux et s'amuse à faire le maximum de ricochets. PLIF PLIF PLIF PLOUF. Passer quelques jours à Whitehorse et voir ce qu'il en est. PLIF PLIF PLIF PLOUF. Trouver une intrigue, un sens à l'histoire, quelque chose pour débuter quelque chose, il faut le it, PLIF PLIF PLIF PLOUF. Trouver un attachement, un intérêt à la chose, au trip, à cette séquence de vie. PLIF PLIF PLOUF. Mais qu'est ce qu'il fout à Whitehorse, Alaska Highway, Snake, blablatage, rencontres et disparitions et tout et tout, PLIF PLIF PLIF PLOUF.
En ramassant un dernier galet, le pingouin mit la main sur une montre argenté. Elle marche encore. Une montre avec une petite inscription « Quartz », une montre qui fait TIC TAC sans arrêt et qui montre le temps qui passe. Et c'est flippant de voir le temps qui passe.
Il se l'enfila à l'aile gauche, prit son BIG BAG et continua de marcher vers là-bas, à l'hôtel pas cher mais dégueu, le GOLD RUSH INN.

A Whitehorse, les murs sont pleins de peinture. Il y a des fresques décolorées. Ça montre des chercheurs d'or, ça montre des mines d'or, ça montre des soleils quand il fait nuit, ça montre des Indiens qui sourient et qui ne boivent pas et qui sont propres et qui ont des vêtements de grands peuples. Ça montre des épisodes de gloire et des souvenirs, des rêves de glace, de neige, de blanc comme des pages blanches bonnes à être gribouiller, et l'on pourrait produire des tonnes de brouillons, des tonnes d'essais. On savait de toute manière que les icebergs recouvriraient tout et nous permettraient de tout recommencer.
En marchant sur la 2nde Avenue, la vie semblait s'être fait la malle mais les yeux du pingouin s'illuminaient, et il pouvait presque entendre des chevaux taper des sabots (l'hallucination des premiers hommes).

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